Pénurie et restrictions sous l’Occupation – Les Jours Sans

Auteur: Archives Ville de Brest

Lorsque la France entre en guerre contre les forces de l’Axe en 1939, le gouvernement commence à rationner les produits de consommation, en particulier la nourriture. Suite à la défaite, cet état de fait empire sous l’Occupation car l’État français est obligé de rémunérer l’armée allemande qui occupe son territoire à coup de 400 millions de Francs (anciens) par jour ! Des cartes de rationnement sont émises à toute la population, et celles-ci octroient à chaque citoyen le droit d’acheter quotidiennement de la viande, du sucre, du pain, du charbon ou du tabac en petites quantités, certaines denrées étant plus rares que d’autres. Le pourcentage de grammes alloués par personne était évidemment en dessous de ce que recommande présentement le guide alimentaire mondial, mais en temps de crise, vaut mieux se mettre quelque chose sous la dent que rien du tout.

Si un système de ravitaillement était déjà en place dû au décret tombé le 10 mars 1940, c’est après l’armistice qu’un changement de régime autant politique qu’alimentaire s’opère. En effet, dès le mois d’août, c’est le pain, le sucre et les pâtes qui sont rationnés; quelques mois plus tard, c’est au tour de la viande, du beurre, du fromage, du café, de la charcuterie, des oeufs et de l’huile de l’être également. L’année suivante, c’est le chocolat, les légumes secs, les poissons, les pommes de terre, le lait et le vin. Pour équilibrer la distribution de nourriture et de textiles, la population est divisée en huit catégories: E (enfants de 0 à 3 ans), J1 (enfants de 3 à 6 ans), J2 (enfants de 6 à 12 ans), J3 (enfants de 13 à 21 ans ainsi que les femmes enceintes), A (personnes de 12 à 70 ans), V (vieillards de plus de 70 ans), T (travailleurs  de 14 à 70 exerçant un métier pénible) et C (personnes se livrant aux travaux agricoles). Tout cela durera pendant dix ans puisque ce n’est qu’en 1949 que la France mettra fin aux cartes de rationnement.

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Évidemment, après la défaite de 1940, le moral des Français est au plus bas, et les pénuries ne font rien pour le remonter. Mais contre mauvaise fortune bon coeur, on commence à prendre cela avec un peu plus de légèreté; en effet, quelques chansons de l’époque se moqueront ouvertement des circonstances, soulignant le comique d’une situation a priori déprimante. Après tout, le rire n’est-il pas le meilleur des remèdes ? En 1942, c’est Fernandel qui marque les esprits avec sa célèbre Les Jours Sans, soulignant la privation qui affecte la population française au quotidien. Sur une musique composée par le regretté Casimir Oberfeld, le titre deviendra une expression courante pour indiquer que quelque chose manque, inspirant peut-être un bon nombre de chansons françaises ultérieures. Notons que l’année d’avant, une collaboration entre le chanteur Georgius et le compositeur Rawson avait abouti à la pièce Elle a un stock, une goualante humoristique sur une femme – appelée Madame Duchnock – qui fait des provisions qu’elle cache un peu partout dans sa maison. Une autre ritournelle contemporaine évoque aussi un personnage qui, même s’il n’a pas fait de provisions de bouche, accumule un tout autre stock; Jacques Pills, dans Le Marché rose, estime que l’amour demeure la meilleure des denrées à échanger de façon clandestine. 

Fernandel – Les Jours Sans

Georgius – Elle a un stock

Jacques Pills – Le Marché rose

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Cependant, les rationnements n’affectent pas seulement la nourriture, comme le marque la chanson de Pills: « D’accord, je n’ai plus que le Saint Christophe de mon auto/D’accord, si j’avais des pneus, j’irais à vélo/D’accord, pour avoir des pneus, il faut du charbon ». Des voitures sont réquisitionnées, l’essence et le charbon sont rationnés et de fréquentes pannes de métro ont lieu à cause des restrictions. C’est une goualante de Jean Boyer, Pour me rendre à mon bureau, qui détaillera de façon amusante cet état de fait. Dans cette pièce, le protagoniste tente en vain de se déplacer sous l’Occupation, alors que tour à tour ses moyens de locomotion aboutissent à un échec. Si c’est Georges Tabet qui l’a originalement créé en 1943, c’est un autre Georges – Brassens, celui-là – qui la reprendra en 1980 pour l’album Georges Brassens chante les chansons de sa jeunesse, en omettant toutefois la dernière strophe pour finir de façon plus philosophe.

Georges Tabet – Pour me rendre à mon bureau

Georges Brassens – Pour me rendre à mon bureau

Pour souligner cette période de la vie française, une exposition temporaire a présentement lieu à Lyon, au Centre d’Histoire de la Résistance et de la Déportation, et se terminera fin février 2018. Pour plus d’informations, cliquez sur ce lien.

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Paroles

Georges Brassens – Pour me rendre à mon bureau

Fernandel – Les Jours Sans

Georgius – Elle a un stock

Jacques Pills – Le Marché rose

Georges Tabet – Pour me rendre à mon bureau

Sources

La ballade de Tom Dooley

En 1866, un ancien soldat confédéré Tom Dula est formellement accusé du meurtre de sa petite amie, Laura Foster, en Caroline du Nord. Pris d’un accès de colère, il lui aurait transpercé le coeur d’un coup de poignard et, deux ans plus tard, aurait été pendu pour ce crime. Ce qui semble être a priori qu’un fait divers sans importance deviendra rapidement une de ces « ballades meurtrières » si chères à la culture musicale des Appalaches, comme Frankie and JohnnyLittle Sadie ou encore Banks of Ohio. Mais voilà, était-il vraiment coupable ? 

Crédit: Jan Kronsell

Relâché d’une prison unioniste au printemps 1865, le soldat Tom Dula est alors âgé de 20 ans et décide de retourner chez sa mère, à Wilkes County. Il désire ardemment revenir auprès d’Ann Melton, une voisine avec laquelle il entretenait une relation avant la Guerre de Sécession. L’année suivante, l’ancien soldat s’acoquine avec Pauline et Laura Foster; non seulement ces deux nouvelles conquêtes sont des cousines d’Ann, mais cette dernière est marié depuis plusieurs années à un certain James Melton. Et comme si cela n’était pas suffisant, ils contractent tous la syphilis à cause… de Pauline. 

Puis, tout bascule le 25 mai 1866. Laura Foster s’enfuit de chez son père avec un de ses fidèles destriers; si le but avoué de sa fugue est de se rendre au Tennessee, elle part cependant dans la direction inverse, vers la maison des Dula. Quelques jours plus tard, le cheval revient seul, s’étant selon toutes apparences détaché. Une rumeur selon laquelle Dula et Ann auraient assassiné Laura commence alors à circuler à cause… de Pauline (décidément). Cette dernière est arrêtée, et questionnée; elle révèlera aux policiers l’emplacement exact de la tombe creuse où a été enterrée le cadavre de l’infortunée Laura. Le couple alarmé s’enfuit à bride abattue mais manque de chance car il est intercepté tout près de la frontière de la Caroline, grâce à un certain James Grayson. Ce dernier avait engagé l’ancien soldat confédéré afin de travailler sur sa ferme et participera à sa capture. Les deux suspects sont rapidement mis sous les verrous, et le verdict prend près de deux ans avant d’être prononcé. Dernier acte de cette comédie noire, Tom Dula signe une confession dans laquelle il exonère Ann de tout soupçon; il finit ses jours au bout d’une corde, alors que sa maîtresse mourra deux ans plus tard, des causes d’une fièvre foudroyante probablement due à sa maladie vénérienne. 

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Une des premières compositions consacrée au drame sera écrite par le Colonel Thomas Land, qui avait vécu à Wilkes après la guerre. Dans ce poème sur la mort de Laura Foster, l’ancien militaire fait référence à Dula et Melton sans les nommer dans la ligne « She met her groom and his vile guest » (« Elle a rencontré son fiancé et sa vile invitée »). Pour lui, il est évident que le couple était de mèche dans le meurtre de la pauvre Laura. S’il s’agit là avant tout d’une oeuvre littéraire, elle sera chantée à quelques occasions sur fond musical. Une autre pièce attribuée à Tom Dula existe aussi, néanmoins il est hautement improbable qu’il en fut l’auteur; celle-ci écrite à la première personne fait état d’un homme qui veut donner son banjo puisqu’il ne pourra plus en jouer après son exécution. Mais c’est en 1867, c’est-à-dire pendant que Dula est toujours en prison et attend le verdict, qu’est composé la populaire The ballad of Tom Dooley; c’est ce qui explique les paroles « You killed poor Laura Foster/And now you’re bound to die » (« Tu as tué la pauvre Laura Foster/Et maintenant, tu vas mourir »). Selon certaines sources, cette ballade aurait été conservée pour la postérité grâce à un certain Calvin Triplett qui vivait à Caldwell County, juste à côté de Wilkes, au moment des faits. S’il y a une modification au niveau du nom, « Dooley » est en fait la prononciation appalachienne de Dula.

 

Crédit: Jan Kronsell

Un premier enregistrement voit le jour le 30 septembre 1929, par le duo Grayson et Whitter. Si l’on reconnaît difficilement la mélodie à cause du violon, c’est pourtant la même qui subsistera dans des adaptations postérieures. Quelques strophes semblent être à la première personne, et une d’entre elles indique clairement que le protagoniste désire donner son violon car il ne lui sera plus d’aucune utilité bientôt – ce qui rappelle la pièce apocryphe attribuée à Tom Dula. Une particularité de la version de Grayson et Whitter, des détails sur la taille de la tombe sont donnés (4 pieds de long, 3 pieds de profondeur). Une deuxième mouture au banjo est interprétée en 1940 par Frank Proffitt, à qui le folkloriste de renom Alan Lomax attribuera à tort la paternité de l’oeuvre. Cependant, fait à noter, la tante de Proffitt lui a transmis la chanson, l’ayant fort probablement entendu de ses parents qui vivaient à Wilkes à la fin des années 1860. Un autre recenseur de chansons folkloriques étasuniennes, Frank Warner, gravera sur disque sa propre version en 1952.

Grayson et Whitter – Tom Dooley

Frank Proffitt – Tom Dooley

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Et, à peine quelques années plus tard, en 1958, c’est la version du Kingston Trio qui deviendra un énorme hit. Composé de Dave Guard, Bob Shane et Nick Reynolds, le trio choisit d’ajouter Tom Dooley à leur répertoire, en ralentissant le tempo. Résultat ? Près de six millions de disques seront écoulés et la goualante contribuera au boom du style folk à la fin des années 50 et début 60, influençant des artistes comme Bob Dylan ou Joan Baez. Un des ajouts du trio musical à la version de Proffitt sera un passage parlé au début de la chanson afin de bien souligner les mauvais présages qu’engendre un triangle amoureux.

Kingston Trio – Tom Dooley

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Plusieurs versions françaises de Tom Dooley voient le jour dès 1958, la même année que le Kingston Trio. Notons premièrement l’adaptation de Max François que chanteront les Compagnons de la Chanson et Philippe Clay sur les arrangements musicaux de Maurice Ricet. Dans celle chantée par Clay, ce dernier ajoute un couplet parlé avant d’entamer la chanson dans lequel il est révélé que Dooley aurait assassiné sa femme car elle l’avait trompé – ce qui n’est dans aucune des trois pièces en anglais. Peut-être voulait-il par là atténuer le meurtre de Laura Foster en prétextant un crime passionnel. L’année d’après, c’est la grande dame de la chanson Line Renaud qui reprendra le morceau, en y ajoutant une petite passe un peu plus « brésilienne », si on peut dire.

Les Compagnons de la Chanson – Tom Dooley (Fais ta prière)

Philippe Clay – (Fais ta prière) Tom Dooley

Line Renaud – Tom Dooley

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Le célèbre parolier Jacques Plante composera à son tour une autre mouture pour Henri Decker; les différences entre les deux chansons sont très marquées. Premièrement, celle de Plante est chantée à la première personne; deuxièmement, l’idée que Dooley aurait tué Laura parce qu’elle en aimait un autre est souligné plus explicitement. De plus, Decker affirme que le protagoniste serait né au Tennessee, alors qu’il venait de Caroline du Nord – ce qui a probablement facilité la rime. Enfin, le choeur affirme qu’il se balancera d’un chêne, un clin d’oeil au morceau de Proffitt/Kingston Trio (« Hanging on a white oak tree »). 

Henri Decker – Tom Dooley

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Paroles

Philippe Clay – (Fais ta prière) Tom Dooley

Les Compagnons de la Chanson – Tom Dooley (Fais ta prière)

Henri Decker – Tom Dooley

Line Renaud – Tom Dooley

Sources

 

 

Une réconciliation souhaitée pour les fêtes – Noël à Jérusalem

En ces temps incertains où l’annonce du président étasunien de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël a soulevé l’ire d’une partie du Proche-Orient et que la guerre perdure en Syrie, nous ne pouvons que souhaiter une accalmie le plus tôt possible et une réconciliation entre Israéliens et Palestiniens en bonne et due forme. L’espoir d’une paix en Terre Sainte n’est évidemment pas nouveau, et de nombreuses chansons en français ont souligné le désir d’un rapprochement interreligieux. Parmi celles-ci, nous avons retenu Noël à Jérusalem, créée il y a presque cinquante déjà. La genèse de cette pièce commence en 1967, lorsque Israël prend possession de la Cisjordanie pendant la Guerre des Six Jours. Cette conquête permet aux Juifs de pouvoir se rendre au Mur des Lamentations, haut lieu de pèlerinage, dont l’accès avait été restreint voire interdit aux citoyens d’Israël depuis 1948 par la Jordanie.

L’année suivante, en 1968, Enrico Macias se rend en Israël, accompagné d’une équipe de la télévision française afin de filmer Jérusalem du point de vue d’un Juif (c’est-à-dire lui-même), d’un Chrétien et d’un Musulman. Au même moment, Joseph Kessel est lui aussi à Jérusalem pour tourner un documentaire intitulé Un mur à Jérusalem. Un jour, Louis Hazan, le PDG de Phonogram, appelle le natif de Constantine pour lui demander de composer la musique dudit film. Enrico accepte, et part avec sa guitare s’installer devant ce mur de toutes les prières et de tous les espoirs; inspiré par l’exaltation des croyants, il compose une mélodie dont il a le secret. Le lendemain, il reçoit une mauvaise nouvelle de la part d’Hazan: Kessel a déjà trouvé une musique pour son film. Macias conserve sa composition, et retourne en France, où il retrouve un de ses paroliers fétiches, Jacques Demarny. Lorsque ce dernier entend le périple d’Enrico en Terre Sainte, il réagit tout de suite: Pourquoi ne pas composer une chanson sur le Mur à Jérusalem ? Macias accepte et lui suggère d’y représenter les fidèles des trois religions monothéistes, réunis pacifiquement pour un Noël… à Jérusalem.

Enrico Macias – Noël à Jérusalem

Pour la petite histoire, les disc-jockeys de l’époque mirent la goualante dans la même catégorie des chansons de Noël comme Petit Papa Noël, au lieu d’y voir un hymne, une prière pour la paix au Proche-Orient.

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Paroles

Enrico Macias – Noël à Jérusalem

Sources

  • ZEITOUN, F. Toutes les chansons ont une histoire : Petite chronique des tubes d’avant-guerre à nos jours. Paris : Ramsay, 2000, p. 108-110.

Droits d’auteur

  • La photo utilisée en couverture est une création de Peter Mulligan.

Un Noël sur voix de velours – Tino Rossi chante Petit Papa Noël

En 1946, Tino Rossi s’apprête à jouer dans le film Destins, une comédie dramatique musicale, et une chorale d’enfants afro-américains est engagée pour interpréter une chanson. Malheureusement, cette troupe fait faux bond à la production au dernier moment, et il faut remplacer ce numéro par une pièce originale. Le chanteur à la voix de velours doit alors choisir une ritournelle à interpréter sur le thème de Noël. Cependant, l’artiste corse ne veut pas de goualantes jugées trop catholiques, car cela rappellerait Vichy dans la psyché d’une France d’après guerre. Rossi décide de passer en revue ses compositeurs fétiches, question de trouver une pièce à ajouter à son répertoire. Un jour qu’il se trouve chez Henri Martinet, reconnu pour ses opérettes, il lui demande avant de quitter ce qui était arrivé à cette chanson composée il y a quelques années pour un projet qui n’avait pas abouti; il s’agissait d’une berceuse qu’un enfant entonne pour son père, prisonnier en Allemagne, et dont il souhaite le retour. Le chanteur corse l’entend et l’aime bien si bien qu’il décide de confier les paroles à Raymond Vincy, associé à Vincent Scotto et Francis Lopez. Petit Papa Noël sort en 78 tours chez Columbia dès 1946, et devient rapidement un succès puisqu’elle est évacuée de toute connotation religieuse et que la mélodie paraît avant tout simple, sur une grille musicale avec peu d’accords, si bémol – fa – si bémol – fa. 

Tino Rossi – Petit Papa Noël

Petit Papa Noël continuera de se vendre en 45 tours; aujourd’hui, cette goualante demeure la chanson française la plus vendue dans le monde, avec quelque 40 millions d’exemplaires. Cette berceuse a de surcroît été enregistrée par de nombreux artistes francophones, dont Jean Lumière, André Claveau, Dalida, Nana Mouskouri, Mireille Mathieu… Il faut croire que devant une telle ampleur, Tino Rossi était dans ses petits souliers

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Paroles

Tino Rossi – Petit Papa Noël

Sources

 

La chanson du consentement – Tu veux ou tu veux pas

Chanteur brésilien peu connu hors de son pays natal, Wilson Simonal avait fait ses débuts comme crooner de rock n’ roll et chantre de calypso, avant de s’orienter sur les conseils de Ronaldo Boscoli vers la samba traditionnelle et la bossa nova. Rappelant par moment Harry Belafonte ou James Brown, il avait une certaine suavité de Carioca communicative.  Après son tournant musical, sa carrière prend de l’ampleur, et ce, malgré quelques controverses. En effet, Simonal interprétera une chanson sur l’emploi du sucre comme talc (Mamãe passou açúcar em mim) à une époque où la cocaïne fait des ravages autant dans les classes supérieures que dans les favelas. Puis, il s’approprie la pièce de Ben Jorge País Tropical, en modifiant les paroles et en y glissant des slogans commerciaux pour une compagnie pétrolière… avant même d’avoir acheté les droits. Il connaîtra aussi des démêlés avec la justice brésilienne lorsque la dictature des généraux prendra fin en 1984; si on l’accusera d’extorsion de fonds à l’endroit de prisonniers politiques, Simonal se défendra en disant qu’il n’était qu’un indicateur. Condamné, il sera ostracisé du monde musical brésilien, avant de mourir en 2000.

Outre les goualantes nommées plus haut, un de ses succès sera sans contredit Nem vem que não tem, composé par Carlos Imperial. Le titre de la chanson peut être traduit littéralement en français par: « Ne viens pas car tu ne l’auras pas ». C’est une expression signifiant qu’on demande l’impossible ou tout simplement si on ne veut pas parler d’un sujet avec quelqu’un. 

Wilson Simonal – Nem vem que não tem

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C’est en 1969 que la chanson fait son chemin jusqu’en France, par l’entremise d’un clarinettiste et saxophoniste jazz qui n’a pourtant rien d’un chanteur à la mode. Maigrichon, moustachu, avec des lunettes et un bob qu’il ne quitte jamais, Marcel Zanini se voit offrir par Léo Missir, directeur chez Barclay, l’adaptation française de Nem vem que não tem, signée par Pierre Cour. Devenue Tu veux ou tu veux pas, la pièce est enregistrée est une récidive du jazzman, puisqu’il avait sorti l’année précédente un 45 tours avec Un scotch, un bourbon, une bière comme goualante principale, et un autre disque Tout le monde aime ma baby en 1966.

Cependant, il y a un hic. Quelqu’un d’autre vient d’entendre la chanson, et désire la mettre ardemment à son répertoire, il s’agit d’une chanteuse qui a déjà interprété des pièces brésiliennes… Brigitte Bardot ! En effet, la plantureuse blonde estime que le sous-texte sexuel de Tu veux ou tu veux pas conviendrait beaucoup mieux à un sex symbol qu’à Zanini. Après une chaude lutte avec les producteurs, c’est l’homme au bob qui l’emporte et c’est son 45 tours qui se retrouvera dans les bacs et à la radio, avant celle de Bardot.  Ce sera un véritable succès pour le jazzman, qui enfilera coup sur coup plusieurs 45 tours dans les années 70, alors que la carrière musicale de Brigitte s’estompera après 1973. 

Peut-être lui avait-on demandé, pour le convaincre, s’il voulait ou ne voulait pas, que c’était comme-ci ou comme ça…

Marcel Zanini – Tu veux ou tu veux pas

Brigitte Bardot – Tu veux ou tu veux pas

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Paroles

Brigitte Bardot – Tu veux ou tu veux pas

Marcel Zanini – Tu veux ou tu veux pas

Sources

  • DELFINO, J. P. COULEURS BRASIL: Petites et grandes histoires de la musique brésilienne. Mercuès: Le Passage, 2014.
  • ENCYCLOPÉDISQUE [http://www.encyclopedisque.fr/] Consulté le 20 décembre 2017.
  • ROSE, A., VALE, N. et CAÇADOR, J. Party Brazil Phrasebook 2014: Slang, Music, Fun and Futebol. Berkeley: Ulysses Press, 2014, p. 61.