La genèse de la chanson La valse à mille temps a eu lieu au premier étage de l’immeuble dit « des Brel » à Bruxelles, en 1958. À cette époque, Jacques et Miche recevaient les mardis la chorale l’Entonnoir, dont était membre leur gouvernante; puisque cette dernière devait s’occuper de leurs enfants, il lui arrivait de rater les réunions de ladite troupe. Qu’à cela ne tienne, le grand Jacques avait décidé que l’Entonnoir tiendrait désormais ses sessions chez lui. Et c’est lors des répétitions de cette troupe qu’il chantait à la guitare un morceau qu’il avait composé mais pas encore enregistré. Celle-ci lui avait été inspirée lors d’un voyage de vacances au Maroc, lors d’un trajet sur une route sinueuse et infinie à Casablanca… Comme quoi tout peut inspirer un chanteur, même les délais routiers!
Toujours en 1958, il se produit en spectacle à Scheveningen, aux Pays-Bas, et la crée devant un public néerlandais, qui n’avait peut-être pas tout à fait compris la complexité de cette goualante. À l’Exposition universelle, qui se déroule la même année à Bruxelles, Brel chantera trois morceaux dans le village dit « La Belgique Joyeuse », dont évidemment La valse à mille temps. C’est en septembre 1959 qu’il passera en studio afin de la graver sur disque; on peut dire qu’il y a mis le temps…
La chanson est en elle-même un témoignage de la passion de Brel pour le jeu des sonorités. Remarquons au passage que si la valse traditionnelle repose sur trois temps, le grand Jacques ose en créer quelques unes, fictives, bien plus longues… Pourquoi? Tout simplement pour les calembours (Ah, ces Belges!) que cela lui permet de faire. Pour Przybylski, il s’agit là d’un défi qu’il s’était lancé lui-même lorsqu’il avait entendu parler d’un groupe s’appelant Les Trois Milson (lire les trois mille sons). Et voyons ce que cela a donné:
Une valse à cent temps/Une valse à cent ans/Une valse ça s’entend
Une valse à mille temps/Une valse à mille temps/Une valse a mis le temps
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Clin d’oeil
En 1961, l’acteur Jean Poiret décide d’écrire et de chanter une parodie intitulée La vache à mille francs; il y parle entre autres de l’augmentation du prix de la viande en France, surtout à Paris, en dénonçant les mesure du gouvernement. Les temps qui se succèdent sont en fait les étapes de la vie d’une vache, du pré à l’assiette, en passant par l’abattoir…
Jean Poiret – La vache à mille francs
La même année, lors de son passage à l’Olympia, Brel semble faire une référence à cette parodie lorsqu’il chante La valse à mille temps. En effet, au début du deuxième couplet (vers 1:20), il commence de façon assez amusante « Au deuxième temps de la vache/On est deux, elle est dans mes bras ». On peut d’ailleurs entendre le public, qui a certainement compris la référence, applaudir chaudement l’allusion.
Jacques Brel – La valse à mille temps (à l’Olympia)
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Paroles
Jacques Brel – La valse à mille temps
Jacques Brel – La valse à mille temps (à l’Olympia)
Jean Poiret – La vache à mille francs
Sources
- ENCYCLOPÉDISQUE [www.encyclopedisque.fr] Consulté le 20 mai 2016.
- PRZYBYLSKI, E. Brel, la valse à mille rêves: biographie. Sine loco: Archipel, 2008.