La nouvelle tactique du gendarme – Les Brigades du Tigre

Pendant la Belle Époque, le crime sévit sur le territoire français. Paris est assiégée par des Apaches, le Nord-Pas-de-Calais et la Belgique par la bande Pollet, les Chauffeurs de la Drôme terrorisent Valence et partout, il y a des anarchistes prêts à bondir. Avec l’essor de nouveaux moyens de transportation, comme le train et l’automobile, les malfrats profitent d’avantages dont leurs prédécesseurs ne jouissaient pas. Il est donc temps pour la police judiciaire d’également se moderniser. Fort de ce constat, le ministre de l’Intérieur Georges Clémenceau décide de créer alors, sous les conseils de Célestin Hennion, les Brigades régionales de police mobile. Le 30 décembre 1907, cette unité spéciale – connu sous le nom des « Brigades du Tigre », une référence à Clémenceau – compte désormais douze brigades prêtes à donner main forte aux gendarmes (le texte du décret peut être consulté ici). Bientôt, situées dans les villes principales de France, ces Brigades utilisent la technologie de l’époque à leur tour: automobile, anthropométrie, téléphone, télégraphe… et même la savate! Les résultats sont au rendez-vous et, en 1912, la célèbre bande à Bonnot sera démantelée.

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Les Brigades du Tigre marqueront les esprits et feront l’objet de quelques adaptations, dont un film en 2006. Mais la plus connue est certainement la série télévisée de Claude Desailly, qui durera six saisons entre 1974 et 1983. Le générique sera interprété par Philippe Clay, sur une musique de Claude Bolling et un texte de Henri Djian. Véritable complainte chantée du point de vue d’un brigand de la Belle Époque, la goualante reprend les thèmes de la modernisation de ce service de police, dont les fiches signalétiques (« De face, de dos, profil, ils ont nos bobines en photo »), ainsi que l’emploi d’automobiles (« Ni grands, ni gros, ils ont laissé leurs vélos, leurs chevaux/En torpédo, de vrai casse-cous à 35 au chrono »). Enfin, la chanson vante la qualité des Brigades, puisque Clay va même jusqu’à supplier le ministre de l’Intérieur de faire preuve d’un peu de relâche dans le service (« M’sieur Clemenceau, pensez à nos femmes et à nos marmots »). Après tout, même les criminels doivent s’occuper de leur petite famille!

Philippe Clay – La complainte des Apaches

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Paroles

Philippe Clay – La complainte des Apaches

Sources

La tactique du gendarme

Bourvil, André Raimbourg de son vrai nom, a longtemps été associé sinon assimilé à son personnage de paysan naïf au grand coeur – rôle qu’il reprendra au cinéma à maintes reprises, de La ferme du pendu à La jument verte. Cependant, bien avant les Louis de Funès et Michel Galabru, Bourvil a interprété un gendarme pour le plus grand plaisir des spectateurs français ! En 1949, il tourne dans le film Le Roi Pandore, reprenant le rôle de Léon Ménard qui, après avoir perdu son trône fraîchement acquis, se reconvertit en agent de la paix. Bien que ce soit loin d’être d’une grande oeuvre cinématographique – n’en déplaise à André Berthomieu – le film sert entre autres de véhicule pour promouvoir son chanteur principal. Ce genre de film était monnaie courante à l’époque, il suffit de penser à la filmographie de Fernandel, Elvis Presley, les Beatles… Mentionnons au passage que la chanson Les crayons (interprétée dans La ferme du pendu) a lancé la carrière de music-hall de Bourvil et, qu’en chantant Aragon et Castille dans Poisson d’avril, il a permis à un certain Boby Lapointe de se faire connaître…

Composée avec son comparse de l’époque, le compositeur Étienne Lorin, la chanson sera gravée sur un 78 tours avant d’être rééditée sur des 33 et 45 tours. Le morceau restera longtemps associé à Bourvil, devenant même le titre de la nécrologie (écrite par Jacques Siclier) pour son ami et co-vedette du rire, Louis de Funès.

Clin d’oeil

En 1970, Bourvil accepte de jouer le commissaire Mattéi dans un film de Jean-Pierre Melville intitulé Le Cercle Rouge. Dans ce qui s’avéra être sa dernière performance d’acteur, le comédien dévoile une profondeur insoupçonnée, puisque ses rôles précédents le cantonnaient plutôt dans des personnages superficiels et simplistes. Mais, lors du dernier jour de tournage dudit film, l’acteur commencera à chantonner de façon impromptue La tactique du gendarme, surprenant ainsi acteurs et techniciens sur le plateau.

Paroles

Bourvil – La tactique du gendarme

Discographie

195? – 33 tours LP : Les crayons/À bicyclette/Pour sûr/C’est l’piston/La tactique du gendarme/Graffouigne-moi/Vive la mariée/Papa joue du trombone

1960 – 45 tours EP : Causerie anti-alcoolique/Vive la mariée/La tactique du gendarme

196? – 33 tours LP : Les crayons/À bicyclette/Pour sûr/C’est l’piston/La tactique du gendarme/Graffouigne-moi/Vive la mariée/Papa joue du trombone

197? – 33 tours LP : Les crayons/À bicyclette/La tactique du gendarme/Le pêcheur/Causerie anti-alcoolique/Les haricots/La berceuse à Frédéric/Ballade irlandaise/Salade de fruits/Les rois fainéants/Mon frère d’Angleterre/La tendresse/Du côté de l’Alsace/Bonjour, Monsieur le maître d’école

Sources

  • DICALE, B. Louis de Funès, grimaces et gloire. Sine loco : Grasset, 2009, p. 513.
  • GLÂTRE, P. Jean Dréville, cinéaste. Paris : Créaphis Éditions, 2006, p. 45.

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