Adieu le Jacques, je t’aimais bien – Le Moribond

En 1961, Jacques Brel composera Le Moribond, une chanson d’un homme qui, sur son lit de mort, fait ses derniers adieux. Parmi les témoins autour du moribond, il y a sa femme, le curé vraisemblablement venu lui faire l’ablution, ainsi que deux amis, Émile et Antoine. Si ce dernier n’est pas dans les bonnes grâces du mourant, c’est parce qu’il l’aurait cocufié et qu’il lui survivra – ce qui sous-entend que l’aventure se poursuivra après l’expiation du moribond…    

Ce thème revient souvent chez le chansonnier belge, de quoi inquiéter même. Des morceaux comme Comment tuer l’amant de sa femme quand on a été élevé comme moi dans la tradition, À jeun, La Fanette ou Les Filles et les chiens présentent un homme tourmenté par le fait que sa femme lui ait été infidèle. Catherine Sauvage et Suzanne Gabriello, d’anciennes flammes, le décrivaient comme un homme très possessif et extrêmement jaloux. Le Moribond ne fait pas exception : dans le brouillon de la chanson, on pouvait lire une première ébauche « Toi qui étais l’amant de ma femme/Tu prendras soin de la Thérèse« . Il s’agirait ici de Thérèse Michielsen, surnommée Miche qui était à l’époque la femme de Brel ! Cependant, Jacques Brel était aussi facétieux et aimait à plaisanter auprès d’amis en clamant en public que tel ami courtisait sa femme… Humour belge ? Allez savoir, une fois !

Quant à l’Émile, il ne s’agit certes pas de l’oeuvre de Jean-Jacques Rousseau ! En effet, plusieurs ont souvent supposé que l’Émile était Émile Le Scanff, un chanteur breton mieux connu sous le sobriquet de Glenmor. Les deux hommes ne se sont jamais rencontrés et n’ont eu de contact qu’à travers une relation commune, une belge blonde comme les blés nommée Katell.

Reprises

La chanson sera chantée par le groupe rock franc-comtois Ange dans les années 80. Mais la reprise qui fera le plus parler d’elle est celle de Terry Jacks. Le chanteur canadien, qui a découvert la chanson par l’entremise d’une traduction de Rod McKuen, et enregistrée en 1964 par le Kingston Trio. Seasons in the sun se hissera à la première place du palmarès, à la grande surprise de tous – Jacks était un quasi-inconnu à l’époque.

Clin d’oeil

En 1978, Gilbert Bécaud enregistrera une chanson s’intitulant Quand je s’rais plus là, un morceau portant sur un thème sensiblement pareil à Le Moribond – à savoir, un homme qui va bientôt mourir et qui rassure ses proches. Dans un passage, Monsieur 100 000 volts mentionnera brièvement Brel, lui retournant la balle pour Orly l’année précédente : Ces imbéciles d’hirondelles/Vont vous faire du beau temps/C’est pas facile comme dit Brel/De s’en mourir au printemps. Et, puisque le 45 tours a été dans les bacs en juin 1978, il est à se demander si le grand Jacques a pu l’entendre avant de lui-même faire ses adieux en octobre…

Gilbert Bécaud – Quand j’serai plus là

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Paroles

Jacques Brel – Le Moribond

Gilbert Bécaud – Quand je s’rai plus là

Discographie

Pour Jacques Brel

  • 1961 – 45 tours SP : Le moribond/On n’oublie rien/L’ivrogne
  • 1972 – Ne me quitte pas : Ne me quitte pas/Marieke/On n’oublie rien/Les Flamandes/Les prénoms de  Paris/Quand on n’a que l’amour/Les biches/Le prochain amour/Le moribond/La valse à mille temps/Je ne sais pas
  • 1974 – 45 tours SP : Le moribond/Quand on a que l’amour

Pour Gilbert Bécaud

  • 1978 – 45 tours SP : Un instant d’éternité/Quand je s’rai plus là

Sources

  • BRONSON, F. The Billboard Book of Number 1 Hits: The inside story behind every number one single on billboard’s hot 100 from 1955 to the present. Sine loco : Random House LLC, 2003, p. 358. 
  • ENCYCLOPÉDISQUE [www.encyclopedisque.fr] Consulté le 26 janvier 2014.
  • PRZYBYLSKI, E. Jacques Brel : La valse à mille rêves. Paris : L’Archipel, 2008, p. 269-270.

4 réflexions sur “Adieu le Jacques, je t’aimais bien – Le Moribond

  1. Ping : Ar brezhoneg eo ma bro – Gilles Servat, le chantre breton | Le Net plus ultra de la chanson française

  2. Les paroles de « Quand j’s’rai plus là » ne sont pas de Gilbert Bécaud, mais de Claude Lemesle. Gilbert en était le compositeur et l’interprète et non l’auteur.

  3. Ping : Deux versions pour une chanson – Musiques éclectiques

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