上を向いて歩こう – Sous la pluie d’étoiles de Kyu Sakamoto

Hasashi Oshima a suivi un des parcours les plus singuliers de la musique du monde. Né seulement quatre jours après l’attaque des forces impériales nippones sur la base étasunienne de Pearl Harbor, le chanteur connu sous le nom de Kyu Sakamoto a marqué l’histoire de la pop japonaise. En 1961, à l’âge de vingt ans seulement, il créera le hit planétaire Ue o muite arukou, une ballade mélancolique sur la solitude et la nostalgie des jours passés. Le titre signifie en japonais « Je regarde le ciel en marchant », et c’est ce que fait le protagoniste afin d’éviter que ses larmes ne coulent sur ses joues.

Le parolier Rokusuke Ei était allé à une protestation contre l’ANPO (Le Traité de coopération mutuelle et de sécurité entre les États-Unis et le Japon) qui venait d’être signé en janvier 1960; ce traité prévoyait une continuation de la protection du pays du Soleil-Levant par l’Oncle Sam. En revenant d’une de ces manifestations, et frustré par l’inefficacité des démonstrations, Ei aurait écrit les paroles de la chanson.  

Le responsable de Pye Records, Louis Benjamin, était de passage au Japon lorsqu’il entendit la chanson; il se procura le disque afin qu’un des jazzmen de son label, Kenny Ball, puisse l’enregistrer. Mais puisque le titre de la pièce est perçu comme trop difficile à comprendre, Pye Records décide de la renommer Sukiyaki, un plat de fondue japonaise… qui n’a pourtant rien à voir avec le contenu de la goualante. Alors que la version de Ball commence à grimper dans le palmarès anglais, le disc-jockey étasunien Rich Osborne met la main sur une copie originale et la fait tourner. Il n’en faut pas plus pour que l’original devienne un véritable hit aux États-Unis – le 15 juin 1963, la chanson connue désormais sous le titre de Sukiyaki est numéro 1 au Billboard!

Sakamoto connaîtra un autre succès, plus modeste, avec la chanson China nights, et continuera d’endisquer de nombreux hits dans son Japon natal. Hélas, comme une étoile filante, le jeune crooner n’était que de passage; il périra avec plus de 500 autres passagers lors de l’écrasement du vol 123 Japan Airlines… 

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Le succès inattendu de la chanson japonaise entraîna de nombreuses adaptations et traductions; tout d’abord en anglais, puis dans d’autres langues dont évidemment le français. Dès 1963, une première version de Ue o muite arukou dans la langue de Molière se fait entendre dans le monde. Devenue désormais Sous une pluie d’étoiles sous la plume de Frank Gérald, la goualante parle plutôt d’un amour de jeunesse, naïf mais sincère. Marcel Amont interprétera une version assez métissée: il mélangera le japonais original, le titre anglais de Sukiyaki et quelques passages en français. Il existerait aussi un cover de Tichky, un chanteur d’origine asiatique peu connu. Au Québec, c’est une jeune chanteuse prometteuse du nom de Claude Valade qui assurera une performance vocale chaleureuse. Ce sera d’ailleurs une des premières pièces que chantera l’artiste des Laurentides. L’année d’après, une autre version tournera à la radio, celle de Margot Lefebvre, une vedette de la chanson québécoise plus établie que Valade.

Marcel Amont – Sous une pluie d’étoiles

Claude Valade – Sous une pluie d’étoiles

Margot Lefebvre – Sous une pluie d’étoiles

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Plus récemment, Ue o muite arukou sera réinterprétée par Clémentine en 2011. Parsemant comme Amont sa version française de bribes de l’original japonais, l’artiste française proposera une nouvelle adaptation de son cru. Sur un fond de musique plus folk, ce ne sera plus un amour sous un ciel d’étoiles, mais plutôt une rupture; la chanteuse sera de fait plus fidèle à la goualante créée par Sakamoto. Fait intéressant, Clémentine a vu le jour la même année que l’envol de Sukiyaki au palmarès et, vu sa carrière florissante au pays du Soleil-Levant, tout porte à croire qu’elle est née sous une bonne étoile, peut-être sous une pluie d’étoiles…

Paroles

Marcel Amont – Sous une pluie d’étoiles

Clémentine – Ue o muite arukou

Margot Lefebvre – Sous une pluie d’étoiles

Claude Valade – Sous une pluie d’étoiles

Sources

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